La chef des Fées avait essayé de profiter de la première partie du bal du solstice d’été, mais ses tendances perfectionnistes jumelées avec la nouveauté de la fête après les cérémonies avaient eu raison de ses bonnes intentions. Elle avait donc passé une bonne partie de la soirée à s’assurer que tout allait bien, à régler les problèmes qui survenaient et à préparer la suite du bal. Lilou en était un peu exaspéré, lui qui aurait souhaité profiter de la soirée, mais comme à chaque fête de solstice depuis qu’elle était chef, il suivit sa Fée et l’aida à se souvenir de détails et transmettre des informations à d’autres Fées et Elfes.

La soirée passa donc à la vitesse de l’éclair pour le duo. Lorsque Léanne s’accorda enfin une pause pour grignoter quelques hors-d’œuvre, les Elfes se préparaient déjà pour la danse finale de la cérémonie. Elle grimaça, regrettant encore cette année de ne pas avoir pris le temps de profiter des danses, de la musique, de la nourriture et des gens. En parlant de gens dont elle aurait aimé profiter… Où était Ajartiel? Elle remarqua qu’elle ne l’avait pas vu depuis un bon moment déjà.

Elle se mit à le chercher du regard lorsque l’on frôla son épaule de derrière. Un frisson l’a parcourue et elle se retourna pour voir Elisa, la belle Elfe blonde qu’elle avait embrassé à la bibliothèque il y avait déjà quelques mois. La chef des Fées rougit en croissant ses yeux verts et détourna le regard, gênée. Elle était gênée de l’avoir évité depuis la soirée où elles s’étaient rencontrées. Elle était aussi gênée à cause de la rumeur et ce que devait en penser l’Elfe. Et finalement, elle était gênée parce qu’elle avait espéré que c’était Ajartiel qui était venu la rejoindre.

« Bonsoir Léanne. Ça fait un moment que l’on ne s’est pas vu. » fit l’Écossaise sans trace de reproche dans sa voix.

La Fée grimaça, se sentant mal d’avoir utilisé la tactique Ajartiel sur l’Elfe en l’évitant pour ne pas avoir à assumer les conséquences de ses actes. Niant par le fait même la tristesse et l’incompréhension qui avait probablement accaparé Elisa à la suite du baiser qu’elles avaient échangé. Mais ce déni arrêtait ici, confronté à ses erreurs, Léanne n’essayerait pas de se dérober. C’est pourquoi sa réponse était franche et directe :

« C’est de ma faute, Elisa, je m’en excuse. Le lendemain après t’avoir embrassé, je ne savais pas trop quoi penser et je t’avoue avoir oublié beaucoup de cette soirée. J’étais confuse et au lieu de me questionner et d’aller te voir pour mettre les choses au clair, j’ai fui. Je suis vraiment désolé, j’aurais dû aller te parler avant. » fit la Fée dans un Français ayant un fort accent créole, son regard planté dans celui de son interlocutrice.

L’Elfe fronça son nez adorable, mais ne semblait pas fâché, ce qui étonnait la chef qui, si elle avait été à sa place, aurait été furieuse.

« Tu es pardonnée. Je t’avoue avoir été blessé au début, mais tu ne me devais rien. Ce n’était qu’un baiser. Et d’après ce que l’on raconte entre toi et Ajartiel, j’ai rapidement passé à autre chose… » dit Elisa avec un air un peu déçue.

« Uggggh! » fit Léanne en passant ses mains sur son visage, désespérée. « Tout le monde est au courant, vraisemblablement. »
Elle grogna, désespérée que cette affreuse rumeur continue de perdurer. Heureusement, elle avait décidé de l’ignorer et de faire ce qui lui plaisait avec le chef des Anges. Les autres Catiens pouvaient s’imaginer ce qu’ils voulaient, elle s’en fichait… Du moins, elle essayait. Mais avec Elisa, c’était plus… délicat, disons.


« Est-ce que c’est vrai? » demanda l’Elfe, timidement curieuse.
« Difficile à dire… On est rendu avec tellement de versions de cette rumeur, ça en ait difficile à suivre. Mais pour faire court, oui, je vois le chef des Anges en dehors du travail. Non, ce n’est pas romantique. » répondit l’Afro-Américaine sur un ton qui ne laissait pas la place aux questions.

Elisa parut mal à l’aise. Léanne comprit qu’elle lui avait surement donné l’impression d’être fâché contre elle. Elle se força donc à lui sourire.

« Pardon, je ne voulais pas être brusque. C’est seulement que c’est difficile d’avoir tout le monde qui met son nez dans mes affaires personnelles, mais ne t’en fait pas, je ne suis pas fâché de ta curiosité. Je n’ai juste pas particulièrement envie d’en parler. »
« Oh, non c’est moi qui m’excuse, je n’aurais pas dû. »

La chef eut un petit rire et secoua la tête. Cet Elfe était trop pur pour ce monde. Peut-être qu’en d’autres circonstances, elle aurait essayé pour voir ce qui aurait pu se passer entre elles deux… Mais avec Ajartiel et les rumeurs, c’était déjà assez compliqué comme ça.

« Eux… est-ce que… » commença Elisa. « Est-ce que tu accepterais de danser avec moi, la danse finale? »

La Fée fut surprise par la question et releva la tête pour croiser le regard de l’Elfe aux cheveux blonds. Elle ne s’était pas attendue à ça. Avec le malaise entre elles, elle n’aurait jamais cru qu’elle lui demande d’éterniser ce moment déjà assez désagréable, quoique soulageant.

« Euh.. Je… Je suis désolé Elisa, j’aurais bien aimée, mais je cherchais quelqu’un… Je ne crois pas pouvoir… Si tu restes pour la fête, nous pourrions danser à ce moment-là. Ok? Je suis désolé, je dois vraiment y aller… À tout à l’heure. » fit Léanne en reculant pour finalement se retourner et s’éloigner de l’Elfe et de la conversation malaisante.

« Mais où est cet Ange? » se demanda-t-elle alors qu’elle cherchait Ajartiel.
Il s’est surement poussé, incapable d’attendre, même pour tes beaux yeux, fit Lilou qui suivait sa Fée.
Celle-ci fit la moue, tristounette. Si c’était vraiment le cas, elle aurait aimé qu’il l’avertisse avant au moins. Se sentant mal d’avoir miné l’humeur de Léanne, son Totem alla se poser sur une table près d’elle.
Hé… je plaisantais. Il est surement juste entrain de faire un mauvais coup en retrait… Ah tiens! Je le vois là-bas! Dit-il en s’envolant dans la direction du chef des Ange.

Léanne tourna son regard dans la direction qu’avait pris l’oiseau et remarqua tout de suite le complet rose saumon de son cousin. Elle fronça les sourcils, que faisait-il si loin du bal? Ne serait-il pas censé se préparer pour son rôle de DJ qui allait surement arriver bientôt? C’est par la suite qu’elle remarqua la présence d’Ajartiel a ses côtés. Elle écarquilla les yeux alors que son regard croisa celui de Séraphin. Oh le maudit! Il avait osé!

Elle serra les poings et s’envola dans leur direction, fulminant intérieurement. Elle arriva en moins de deux devant eux et resta dans les airs, à quelques centimètres du sol. La Fée allait gronder son cousin, mais sa colère s’estompa magiquement à la vue du sourire d’Ajartiel. Il avait vraiment de la classe dans son uniforme d’apparat. Elle se demanda de quoi il pouvait bien avoir l’air dans un complet veston-cravate…

« Rebonsoir! Tu m’as caché toutes les fabuleuses histoires que ton cousin a à raconter. Je crois que je viens de me faire un nouveau meilleur pote. », fit-il innocemment.

Sa colère revient à la dernière remarque de l’Ange. Elle lança un regard noir à Séraphin qui lui offrit son plus beau sourire, avant de dire :

« Oh! Le bal tire vers sa fin. Gustave va probablement quitter après la danse, je devrais aller me préparer… »

Il se releva tout innocemment et salua Ajartiel et sa cousine avant de s’éloigner. Léanne le fusilla du regard jusqu’à ce qu’il disparaisse dans la foule. Elle n’avait pu le retenir pour le sermonné, car il avait raison, il était plus que temps qu’il se prépare. Mais ce n’était que partie remise.

Lorsqu’il fut disparu, elle tourna à nouveau son attention vers Ajartiel et prit une grande inspiration pour se calmer. Cela lui permit de remarquer Lilou qui s’était posé un peu en retrait.

« Qu’est-ce qu’il est allé te raconter? Arf… je ne veux même pas savoir. » dit-elle en se posant devant lui, lui offrant un beau sourire. « J’ai cru que tu étais parti sans me le dire… Je suis contente que tu sois encore là… »

Elle entendit la musique de la danse des Elfes qui commença. Son sourire s’élargit et elle fit une légère révérence à son ami.

« Cher Gentleman, m’accorderiez-vous cette danse? » demanda-t-elle en tendant sa main vers lui.

« Danser avec moi, ça veut dire... danser avec moi. » fit Ajartiel.

Léanne fronça les sourcils, intriguée. Mais qu’est-ce qu’il voulait dire? Devait-elle s’inquiéter? Elle n’eut pas le temps de lui demander de préciser ce qu’il voulait dire, qu’il la tirât derrière lui vers la piste de danse.  Elle se dit qu’il prévoyait surement des idioties. Au moins il ne se défilait pas!

Alors qu’ils rejoignaient le bal, Léanne ne pouvait s’empêcher de sourire. Elle avait craint qu’il refuse de danser avec elle, de peur d’attiser les rumeurs. Elle était contente qu’il ait décidé de les ignorer… À moins qu’il n’y ait pas pensé? Elle essaya de ne pas réfléchir à la situation malaisante que cette réalité pouvait produire.

La chef des Fées se concentra plutôt sur les trois duos d’Elfes qui dansaient élégamment, quoique de façon un peu rigide. Elle ne s’y connaissait pas beaucoup en danse, mais à chaque année du bal du solstice d’été, elle ne pouvait s’empêcher de se demander qui avait mit un bâton dans le derrière de ces pauvres Elfes. Elle allait tirer sur la manche à Ajartiel pour qu’il se penche pour qu’elle puisse chuchoter sa pensée à son oreille, mais son regard croisa celui de Gustave. Les éclairs désapprobateurs que le Chef laissaient de ses yeux incita la Fée à garder pour elle ce qu’elle avait pensée. Elle se mordilla la lèvre inférieure en reportant son regard sur les danseurs.

Lorsque ce fut la fin de la démonstration, Ajartiel se tourna vers Léanne, un sourire espiègle aux lèvres. Elle releva un sourcil, suspicieuse, mais pouffa à sa brève révérence. Il n’avait vraiment pas l’air crédible, mais elle lui retourna quand même sa révérence.

C’est au moment où il releva sa main qu’elle réalisa que leur différence de grandeur ne lui permettrait pas de rester au sol. Beuh. Elle n’aimait pas voler pour être au même niveau que les autres races. Elle comprenait les Fées qui en ressentait le besoin, mais elle n’aimait pas le faire. Probablement parce qu’elle avait vécue longtemps avec des humains en cachant sa vraie nature.

Sauf que la situation le demandait. Elle n’allait tout de même pas forcer le chef des Anges à se pencher! Elle prit donc son envol, ses ailes produisant un léger bourdonnement alors qu’elle vient glisser sa main sur celle d’Ajartiel. Elle lui sourit et ils purent commencer à danser.

Concentrés sur leurs mouvements et sur la musique, elle ne réalisa pas tout de suite la proximité du Chef des Anges. C’est en remarquant quelques regards curieux allant dans leur direction qu’elle sentit le rouge lui monter aux joues. Elle soupira, maudissant intérieurement les fouineux qui se régalaient de les voir ainsi. Ils brisaient le moment!

Pour essayer de penser a autre chose, Léanne décida de partir une petite discussion avec Ajartiel. Elle fixa son regard dans le sien, un sourire espiègle sur ses lèvres.

« Hé,tu sais… Si tu veux en savoir plus sur moi… Pas besoin de demander à Séraphin, tu peux toujours me le demander. Qui sait… peut-être que je répondrais à tes questions. » fit-elle avant de lui faire une petite grimace.

Elle pouvait bien se moquer un peu de lui, considérant qu’il avait surement récolté des informations lui permettant de se moquer d’elle.

Aparté #2
Près des arbres de la forêt des elfes, en retrait du coeur du bal...
~~~

« Bonsoir Följerräam. »

Gustave serra les dents à l’entente du nom et tourna un regard acide vers Dyrfägrin. C’était l’une des elfes qui avaient été secourus par la CAT en même temps que lui. Issus de la même communauté, Gustave et elle se connaissaient donc depuis des décennies.

« Cette appellation n’est pas la mienne. », rappela-t-il d’un ton tranchant, à peine plus fort qu’elle n’avait murmuré la salutation.

Malgré la satisfaction ressentie à s’exprimer dans leur langue maternelle, il échangeait de moins en moins souvent avec Dyrfägrin, depuis qu’il avait pris la tête des elfes de la CAT. Désormais, il se contentait de la croiser, certains jours comme aujourd’hui, mais qu’avaient-ils à se dire ? Pour l’un comme pour l’autre, ils étaient le souvenir d’une époque qui n’existait plus.

Dyrfägrin avait tressé ses longs cheveux bruns, comme souvent, et portait une robe traditionnelle de leur communauté, une vision à la fois douce et amer pour Gustave, bien qu’il portait en ce moment lui aussi des bijoux issus de sa culture éteinte, des reliques d’une communauté morte.

« N’est-il pas davantage détestable de répondre au nom de Gustave ? », remarqua la femme elfe. Elle avait l’air attristée, mais pas impressionnée par l’attitude de son ancien compatriote. Elle avait tourné ses yeux caramel vers les danseurs, à plusieurs mètres d’eux, et ne le regardait pas.

Reconnaissant la voix, Gahöga s’extirpa de la poche intérieure de la tunique de Gustave et escalada son épaule. Elle étira le cou et s’enthousiasma en repérant Moïvao, le totem-lérot de Dyrfägrin, jusque là accroché à la ceinture de cette dernière.

« C’est mon nom et c’est ainsi que tu dois t’adresser à moi, Dyrfägrin. », répliqua durement le chef des elfes en relevant le menton et en portant son attention sur les festivités, ignorant l’excitation de Gahöga. Dyrfägrin resta silencieuse, mais s’approcha pour venir se placer à côté de lui.

Moïvao escalada son épaule à elle et invita Gahöga à jouer. Sans plus s’intéresser à leur elfe respectif, les deux totems s’élancèrent dans un arbre à proximité. Gustave détestait savoir Gahöga loin de lui, même si ce n’était que de quelques mètres, et il grinça des dents en les surveillant du coin de l’oeil.

« Est-ce qu– », commença Dyrfägrin, après plusieurs minutes de quiétude, au même instant où Gustave énonça un « Qu’est-ce qu– ».

« Toi d’abord. », céda Dyrfägrin, avec un sourire poli et réservé, sans laisser le temps à un malaise de s’immiscer.

« Qu’est-ce que tu veux, Dyrfägrin ? », soupira Gustave avec lassitude, en lui jetant un regard en coin. Il était satisfait de croiser Dyrfägrin et les autres, parfois, mais ne se faisait pas d’illusion quant au fait qu’ils ne partageaient plus de lien fraternel, depuis qu’il ne restait qu’eux cinq. Dyrfägrin était déjà venu le saluer, plus tôt dans la soirée, quand le chef des elfes accueillait les arrivants avec les autres organisateurs du bal. Pourquoi revenir le voir ensuite ?

L’autre elfe ouvrit la bouche, mais la referma sans rien dire. Elle hésita et il était évident, lorsqu’elle parla enfin, que son commentaire était une excuse et non la véritable raison de sa présence :

« J’ai entendu une rumeur et j’ai pensé que tu aimerais en être informé. »

Gustave tourna légèrement la tête vers elle, haussant un sourcil interrogateur pour l’inviter à continuer. Il se méfiait des rumeurs, néanmoins.

« Cette fête. Après– »

« Je ne veux pas savoir. », coupa sèchement le chef des elfes.

En guise d’acceptation, Dyrfägrin pinça les lèvres et retourna à son observation de la célébration. Après plusieurs autres minutes sans rien s’échanger, elle reprit la parole, son ton de voix à la fois perplexe et amusé :

« En fait, tu es déjà au courant. »

« Je ne suis au courant de rien. », nia Gustave.

Et quand bien même il s’offusquerait de ce... truc qu’ils organisaient dans son dos en le croyant trop stupide pour s’en rendre compte, qu’est-ce que ça changerait ? Au moins le bal du solstice se déroulait tel qu’il le devait, tel que les traditions le demandaient ? La dénaturation qu’ils en feraient ensuite... Il ne voulait pas savoir. Peu importe ce que c’était, ce n’était pas le bal et il ne voulait pas être mêlé à cette absurdité.

Dyrfägrin n’insista pas.

« Je vais me retirer. », annonça sèchement Gustave après un moment, à nouveau irrité par l’idée insultante d’utiliser le bal comme un excuse pour autre chose, idée que l’autre elfe venait de lui rappeler. Il se sentait étrangement épuisé, aussi. Peut-être le stress des derniers jours...

Gustave étira un bras pour faire silencieusement signe à son totem de bien vouloir revenir vers lui, puis il guida Gahöga afin qu’elle revienne se cacher contre son torse. En sécurité.

« Déjà ? », fit Dyrfägrin.

« J’ai du travail qui m’attend, demain. », éluda le chef des elfes, ce qui n’était pas faux.

Dyrfägrin hésita, puis chuchota un « J’ai été contente de te voir... Gustave. », avant de s’éloigner, tandis qu’il en faisait de même en direction de sa cabane, dans la forêt.

Gustave n’alla pas prévenir Léanne ou les autres organisateurs de son départ.

Ajartiel pensait peut-être que c’était facile de voler/danser, mais pendant qu’il regardait ses pieds, Léanne s’assurait, de son côté, de ne pas accrocher quelqu’un avec ses ailes, pas facile avec tous les danseurs autour d’eux. Mais elle aimait quand même cette danse, elle avait quelque chose… d’agréable.

La chef se réjouit de la réaction que sa remarque apporta à l’Ange. Elle aimait le taquiner. Comme son cousin, elle tenait sa fibre tannante de leur grand-mère. En effet, leur Grann aimait agacer ceux qu’elle aimait.

Et comme Séraphin n’en était pas à son premier coup avec Léanne comme victime, elle commencer à remarquer quand il commençait à manigancer dans son dos. Et parler avec Ajartiel comme ça, alors qu’elle lui avait clairement dit de ne pas s’impliquer, ça faisait réagir son alarme de défense. Elle n’avait pas encore de preuves, mais elle savait que son cousin trammait quelque chose.

Ainsi, lorsqu’Ajartiel répondit très vaguement, elle releva un sourcil, l’air de dire : Tu me prends pour qui? On parle de Séraphin ici. Évidemment qu’il allait raconter des trucs gênants sur son compte au chef des Anges, juste pour l’agacer.

« Et donc, pendant qu’il y avait peut-être ou pas des confidences qui s’échangeaient entre Séraphin et moi, sur des gens possiblement ou pas présents à ce bal... tu faisais quoi de bon ? », dit le chef des Anges, tournant la direction de la conversation le plus loin possible de sa personne.

Léanne commençait à être agacée par ces changements de sujets, mais elle ne savait pas encore pourquoi ça l’énervait. Et c’est probablement cet agacement qui fit réagir sa fibre rebelle et qu’elle décida que s’il était pour garder ses secrets, elle allait lui répondre aussi vaguement qu’il l’avait fait.

« Il est possible que je profitais du bal, ou peut-être que faisais autre choses. Qui sait? » répondit-elle avec le même ton d’innocence que l’Ange lui servait si souvent. Tiens mets-toi ça sous la dent! Ça fait quoi de se faire servir sa propre médecine? Hen!

Elle se demanda soudainement où était Lilou, il ne les avait pas suivis au bal. Qu’est-ce qu’il était parti faire? Elle vola un peu plus haut pour pouvoir regarder par-dessus l’épaule d’Ajartiel. Elle finit par l’apercevoir, il était avec Séraphin. La danse la força a tourner avant qu’elle ne puisse en voir plus.

Elle se demandait ce qu’ils faisaient lorsque la pie-grièche apparut à ses côtés, se posant sur son épaule, évitant habillement le mouvement de ses ailes de libellules au passage.

Gustave est parti se coucher! Fit l’oiseau avec enthousiasme. Les somnifères que Séraphin a mit dans son verre on dut aider, il est parti plus tôt que les années passées.

Léanne s’arrêta net dans son mouvement. Wah? Déjà. Oh non! Ajartiel n’ayant pas été avertis, faillit lui rentrer dedans. Elle dut l’éviter à la dernière minute.

« Oh! Pardon. Lilou vient de me transmettre une bonne nouvelle. Je dois aller aider pour le début de la fête. Tu veux venir m’aider? » fit-elle, tout sourire en le tirant doucement vers l’extérieur de la piste de danse.

Depuis qu’il s’était posé sur l’épaule de Léanne, Lilou faisait de son mieux pour ignorer Ajartiel. Il essayait de lui redonner la monnaie de sa pièce et de le traiter avec la même indifférence que l’Ange avait pour lui. Mais la remarque de celui-ci fit tourner brusquement le regard de l’animal vers le Hongrois. D’abord surprise, la pie-grièche se rembrunit assez vite et elle fit gonfler ses plumes et rentra sa tête en regardant ailleurs.

Léanne avait été tout aussi surprise que son totem et s’était retourner vers le chef des Anges pour le questionner du regard, mais ne croisa pas le sien. Elle observa ensuite son totem soudain bien occupé à nettoyer ses plumes et puis Ajartiel et à nouveau Lilou.

Elle éclata de rire, la situation avait quelque chose de très cocasse. Ces deux têtes de plumes avaient plus en commun qu’ils n’oseraient l’admettre. La Fée allait commenter, à la blague, la remarque d’Ajartiel, mais il ne lui en laissa pas le temps.

Après une grimace, que Léanne interpréta comme de la gêne ou du malaise, l’Ange se dota d’un de ses fameux sourire charmeur et se mit à débiter n’importe quoi. Mais son amie ne l’écoutait pas, parce que pour la première fois, elle remarquait quelque chose qui la troubla profondément. Elle avait vue le sourire d’Ajartiel apparaitre comme un masque qui se formait sur son visage. Pendant un instant, elle eut l’impression de ne pas le reconnaître… ou plutôt de ne pas le connaître. Combien de fois il avait mis ce masque devant elle? Cette interrogation lui glaça le sang.

Mais Léanne ne gérait pas bien l’inquiétude, alors elle se tourna vers quelque chose qu’elle connaissait mieux… la colère. Colère qui n’était déjà pas bien loin, alimenté par son agacement des déviations de sujet du Magyar.

« Oh non! Tu ne t’en tiras pas comme ça! J’allais te répondre ne blaguant, mais tu m’énerve trop, alors tu vas avoir la réponse sérieuse! » dit-elle en le regardant droit dans les yeux, ses mots secs et sévères. Elle ne leva toutefois pas le ton.

Lilou écarquilla les yeux et les dévisagea un instant. Oh-ho, ça allait mal tourner. Il n’avait pas le goût de se mêler à ça! Il s’envola pour aller rejoindre Séraphin. Ajartiel n’avait pas cette option. S’il essayait de fuir, Léanne le retiendrait, il pouvait le lire dans ses yeux.

La Fée prit une grande inspiration pour essayer de calmer sa colère, elle n’y réussit qu’à moitié, mais put continuer sa réponse en étant moins acerbe.

« En effet, Lilou ne t’apprécie pas beaucoup. Que tu ne l’ais pas remarqué par toi-même me sidère. Mais enfin, Lilou n’aime pas, en général, partager mon attention avec d’autres personnes. Particulièrement avec les personnes qui je euhm… tu sais. Il finit toutefois, normalement, par accepter, après un certain temps, la présence d’une autre personne dans mon cercle rapproché. Sauf que le truc avec toi, c’est que ce qu’il déteste encore plus lorsqu’on l’ignore. Ce que tu fais. Et tu dois savoir ce qu’il ressent, parce que vous réagissez de la même manière lorsqu’on vous ignore, vous boudez. Mais jusqu’à maintenant je ne considérais pas que c’était de mes affaires, parce que tu ne me posais pas de question et Lilou ne m’a pas demandé de te dire quoi que ce soit, mais ça me purge! Alors, oui! Séraphin a raison, Lilou ne t’aime pas. Si tu veux faire quelque chose de cette information, tu sais où me trouver, je suis prête à t’aider. Si tu préfères retourner au statut quo et que je continus à vous subir, on peu laisser ça là. Dans tous les cas, je vais aller aider Séraphin à apporter son matériel de DJ. »

Et sans un mot de plus, elle s’envola pour rejoindre son cousin. Ensemble et avec l’aide d’une demi-douzaine de Catiens qui étaient dans le secret (surtout des gens travaillant à la discothèque), ils installèrent à la place du lutrin, des haut-parleurs, le matériel de Séraphin, ainsi que des instruments de musiques moins traditionnels, un drum, une guitare électrique et une base. Un micro fut aussi installé. De l’alcool s’ajouta aux tables du banquet alors que les Elfes et Fées plus ronchonneur quittaient la cérémonie en fronçant les sourcils et en marmonnant leur désaccord.

Lorsque tout fut installé, en un temps record de 15 minutes, Séraphin monta sur son petit podium installé derrière son équipement. Il prit le micro et s’envola à quelques mètres du sol pour que tous puissent le voir. Heureux comme tout, il dit :

« Maintenant que les vieux grincheux sont partis, c’est le temps pour la première édition du party du solstice d’été! Amusez-vous, il n’y a pas de couvre feux pour nous! YAHOU! »

Pendant qu’il parlait, des musiciens et un chanteur étaient allés s’installés. Séraphin donna son micro à ce dernier et puis à son signal, la fête commença!

Aparté #3
À l’une des tables installées pour le bal...
~~~

Quelqu’un lui secoua vigoureusement l’épaule et Éléonor leva la tête de son assiette de crudités pour donner toute son attention à la coupable, son amie Andrea.

« Tout à l’heure, j’étais près de la forêt, et j’ai vu Gustave parler avec une fille. »

« Urgh. Pitié. T’es terrible, Andrea. », se plaignit la fée aux cheveux violets, devinant sans peine ce que l’autre infirmière voulait insinuer. Elle sélectionna une tomate cerise, mais Andrea la lui prit d’entre les doigts et l’engloutie.

« Terriblement curieuse, oui. », confirma-t-elle avec une main devant la bouche pour éviter de postillonner du jus de tomate. Elle avala, attrapa un morceau de céleri, directement dans l’assiette de son amie cette fois, et se remit à parler en agitant le légume comme une baguette :

« Je veux dire, il y avait même leurs totems qui avaient l’air de pas mal bien se connaître... »

« Tu as vu le totem de Gustave ? », s’étonna Éléonor, malgré elle. Personne ne le voyait jamais !

Un sourire machiavélique se peignit sur les lèvres d’Andrea, qui hocha la tête, satisfaite d’avoir éveillé la curiosité de sa collègue et amie.

« Pas super bien, parce que j’allais quand même pas risquer de m’approcher... Mais moi, je dis, il y a anguille sous roche. », déclara-t-elle en croquant le céleri qu’elle tenait.

« Ah non. Je ne veux pas être la fille responsable d’avoir démarré une rumeur sur Gustave ! », s’indigna tout de suite Éléonor. Elle avait appris sa leçon, merci bien ! D’autant que Léanne pouvait faire peur, mais, au moins, elle savait faire preuve de clémence. Son homologue elfe, c’était moins certain...

« Non, mais... On discute là... », continua Andrea en roulant des yeux. Elle posa le demi-morceau de céleri qu’elle tenait contre ses lèvres, laissant son regard diverger au loin tandis qu’elle réfléchissait.

« Pitiéééé... », gémit Éléonor en laissa sa tête retomber sur la table devant elle, passant d’ailleurs près de finir avec le visage dans ses légumes.

« Bon, d’accord. Rabat-joie. », soupira son amie. Éléonor l’entendit finir son céleri et la sentit étirer un bras au-dessus d’elle pour aller piger autre chose dans l’assiette. Demeurant méfiante, elle redressa un peu la tête. Andrea ne la regardait pas, grignotant une carotte.

« Alors parlons de Léanne et Ajartiel ! », décida-t-elle soudainement. Éléonor due faire un effort de maîtrise monstre pour ne pas se cacher à nouveau le visage.

« Léanne a été bien claire avec moi. Elle ne veut pas qu’on lance des hypothèses sur sa vie amoureuse. Ce ne sont pas nos affaires. »

« Tsss... Ne lançons pas d’hypothèses alors. Parlons de faits. Fait numéro un : Léanne est radieuse dans sa robe et Ajartiel l’a évidemment remarqué. »

Éléonor se sentit sourire, en dépit de ses efforts. Andrea était juste incorrigible.

« Fait numéro deux : Ajartiel est canon dans son uniforme et Léanne l’a évidemment remarqué. », continua l’infirmière, en levant ses doigts au fur et à mesure de son énumération.

« Fait numéro trois : Regarde comme ils ont l’air de bien s’enteeeeendre ! », s’extasia Andrea en désignant, sans aucune gêne, les deux chefs.

Éléonor lui agrippa le bras pour l’obliger à plus de subtilité.

« Est-ce que tu as bu, Andrea ? », accusa-t-elle.

« Pfff... »

Andrea appuya son coude sur la table et continua d’observer avec attention les interactions entre Léanne et Ajartiel, sur la piste de danse. Après quelques instants, elle ajouta :

« Fait numéro quatre : Ils couchent ensemble. »

Éléonor faillit s’étouffer avec le radis qu’elle avait dans la bouche.

« Non, mais, c’est vraiment un fait. Tout le monde le sait, maintenant. J’ai même entendu dire de Léon, qui le tient de d’Abby, qui le tient de... je crois que c’était Christos ? Bref, un ange. Qu’Ajartiel avait confirmé, comme quoi Léanne et lui... tu vois. Et puis c’est évident, juste à les regarder. »

« Non ? Vraiment ? Je veux dire... » Alors elle n’avait rien imaginé, quand elle les avait trouvés ensemble ?

« Andrea, on devrait vraiment les laisser tranquille. », se reprit Éléonor, avec toutefois un peu moins de fermeté dans la voix.

« Oh, Éléonor, s'il-te-plait ! », répliqua vivement l’autre infirmière. « Okay, personne n'a assisté en temps réel à la chose, mais... Ce n'est pas une hypothèse sur la vie amoureuse de Léanne. Au pire, c'est une hypothèse sur sa vie sexuelle. Certes, les deux ne sont pas si loin... Tu crois qu'ils ont une série de règles en place ? Ce serait tellement cliché. Mais sinon, comment tracer la limite ? Sauf s'il n'y en a pas, de limite... Rah ! Il faut trouver quelqu'un d'assez courageux pour aller se renseigner. »

« Andrea ! »

Andrea la regarda en plissant des yeux, affichant un air faussement colérique. Finalement, elle céda en soupirant.

« D’accord ! Ugh. Léanne t’es vraiment entré dans la tête, toi. »

Mais elle n’allait pas s’arrêter là. Haha. Non. Pas Andrea !

« Sinon, avant qu’il parte, au début de la fête, j’ai vu monsieur Anderson avec Émilienne... »

Éléonor, bien qu'amusée, ferma les yeux. Elle n’allait jamais s’en sortir.

« Je me suis toujours dit que monsieur Ander– Oh ! Oh, oh ! Éléonor ! Élé– »

« Outch. Outch ! Arrête de me taper, je t’entends, je suis juste à côté ! », s’énerva la fée aux cheveux violets en essayant d’éviter les coups légers de son amie, qui tentait apparemment d’attirer son attention comme si elle ne l’avait pas déjà.

« Regardes-les ! Léanne et Ajartiel... je pense qu’ils s’engueulent... »

Bien occupé à rendre le party mémorable pour les Catiens présents, Séraphin prit plus d’une heure à remarquer que Léanne n’était pas de la fête. Pourtant, elle avait été là pour l’aider à préparer l’équipement et il avait cru qu’elle aurait voulu rester pour s’assurer la réussite de la fête. Il la chercha du regard en continuant de mixer sa musique, se souvenant qu’elle lui avait semblé énervée la dernière fois qu’il l’avait vu. Il avait mis ça sur le dos du stress pour le party. Elle était peut-être partie avec Ajartiel? Mais Lilou serait sans doute resté à la fête si ça avait été le cas et il ne le voyait pas non plus. Il regarda Hiro, hésitant à lui demander d’aller à leur recherche. Non! Il n’allait pas s’inquiéter pour si peu, il allait profiter de ce moment tant attendu.

Malheureusement, après une autre heure de plus à ne pas voir sa cousine, le Fae n’arrivait plus à calmer ses inquiétudes. Agacé, il laissa Hiro essayer de trouver Léanne et Lilou. Le totem monta sur l’épaule de Séraphin et frotta sa tête contre sa joue avant de s’envoler.

Cela prit plus d’une demi-heure avant qu’Hiro ne revienne, ce qui ne fit rien pour rassurer Séraphin. Il continua tout de même à animer la fête avec la même énergie qu’au début, mais ses pensées étaient ailleurs. Lorsqu’il vit l’oiseau gris voler vers lui, il sera les dents. Le moqueur chat se posa sur son épaule et lui pipita à l’oreille :
Léanne est au gym.

Elle n’eut pas besoin d’en dire plus. Il comprit que la Fée était fâchée et était aller se défouler. Elle avait probablement interdit à Lilou de venir l’avertir comme il le faisait souvent lorsque Léanne était en détresse depuis le décès de James. Probablement qu’elle n’avait pas voulu gâcher sa soirée. Quelle idiote. Il avait voulu profiter du party avec elle. Ils avaient travaillé fort ensemble pour sa réalisation, il voulait s’amuser avec elle. Il soupira et finit son mix un peu plus rapidement que prévu. Il remercia la foule de danseurs et laissa les musiciens prendre le flambeau. Il quittait.

Séraphin s’envola de son petit podium et prit la direction du gym. En chemin, il se demanda s’il en avait trop dit à Ajartiel. Peut-être que c’était la cause de la colère de Léanne? Merde, il s’attendait bien à ce qu’ils se chicanent, mais il n’avait pas prévu que ce soit aussi rapidement!

En arrivant au gym, il remarqua que les quelques Catiens présent se tenait loin du coin qui contenait les sacs de boxe. Il alla donc dans cette direction, suivant le son des exclamations de colère qui suivaient chaque coup que sa cousine donnait au sac. Il s’approcha d’elle, alors qu’elle donnait de violents coups au pauvre sac rempli de sable qui ne lui avait rien fait. Comme elle lui faisait dos, il s’accota sur une poutre en métal et se racla la gorge. Lilou semblait soulagé de le voir. Le Fae le salua.

Léanne hésita un instant et puis continua a frapper le sac avec vigeur, restant dos à Séraphin. Il fut toutefois heureux de constater qu’elle avait troqué sa belle robe pour une camisole et des leggings.

« Tu ne devrais pas être à la fête? » fit-elle sèchement. « Tu es le DJ. »

L’Afro-Américain sourit en la regardant se défouler. Il ne se sentait pas blessé par le ton abrupt de sa cousine. Elle était en colère et le lui reprocher ne ferait qu’envenimer les choses. Il attendrait qu’elle se soit calmée pour le lui rappeler et qu’elle se sente mal. Niark. Niark. Niark.

« Et tu es l’organisatrice, tu devrais aussi profiter un peu de ton beau travail, non? » répondit-il en croisant les bras.

Pour toute réponse, il eut droit à un grognement agacé suivi d’autres coups dans le sac. Il se demanda s’il était arrivé assez vite pour éviter qu’elle crée un trou dans le sac ou qu’elle se blesse les jointures. Il prit une grande inspiration et redevient sérieux.

« Léanne, qu’est-ce qui s’est passé? » demanda-t-il doucement.
« RIEN ! » fit la Fée furieuse.

Le Fae releva un sourcil et décroisa les bras pour contourner sa cousine et son sac de boxe et lui faire face. Elle évita son regard en se concentrant sur sa posture et sur ses coups. Il se contenta de la regarder en silence, les bras croisés. Après une dizaine de minutes, elle s’arrêta de donner des coups et fixa son regard dans celui de son cousin. Elle le pointa du doigt et dit :

« Si tu veux te rendre utile, enlève cet idiot de blouson et vient te battre! »

Séraphin ne put retenir un sourire. Elle le faisait tellement rire quand elle était en colère. Il retira son « blouson » et le plia méticuleusement avant de le mettre sur un bac. Il défit son nœud papillon en répondant :

« C’est un veston, mais d’accord. Je vais te prendre sur ton offre. »

Il déboutonna ses manches et les roulas en marchant vers une zone recouverte de tapis pour le combat. Léanne le suivit. Il retira finalement ses souliers et ses bas avant de se mettre en position de combat. Léanne s’installa devant lui, mimiquant sa position.

Il n’eut pas à attendre bien longtemps pour qu’elle se jette sur lui pour l’attaquer. Il para ou évita ses coups. Elle se retira, furieuse de ne pas avoir réussi à l’atteindre. Il reprit sa position de départ et la regarda, attendant la prochaine attaque.

Elle vient rapidement. Les coups de Léanne étaient plus techniques que lors de la première attaque, mais la colère de sa cousine la rendait prévisible. Il s’était tellement entrainé avec elle qu’il connaissait sa façon de combattre. Et lorsqu’elle ne pensait pas clair, Léanne attaquait dans des patrons plus prévisibles, moins réfléchit. Elle réussi tout de même à l’atteindre à la cuisse, le faisant grimacer, mais il riposta en la faisant trébucher. Elle tomba violemment sur le dos. Il espéra que ça n’abime pas trop ses ailes.

« C’est Ajartiel qui t’as mis dans cet état? » demanda-t-il alors qu’elle se relevait.

« Cet idiot n’a rien avoir avec notre combat. »répondit-elle en l’attaquant à nouveau.

Le combat continua pendant plusieurs minutes. Léanne attaquait Séraphin, il se défendait. Elle réussit à lui donner quelques bons coups qui abimèrent sa belle chemise, mais à chaque fois qu’elle faisait une erreur le lui permettant, il la faisait tomber par terre. Cela ne fit que gonfler et gonfler la colère de la chef qui attaquait avec de plus en plus de force et de moins en moins de technique. Jusqu’à ce qu’elle tombe face la première et ne se releva pas.

Pendant un moment, Séraphin se tient au-dessus d’elle en souriant d’avoir vaincu le dragon, mais s’inquiéta rapidement alors que la Fée ne bougeait pas. Il fronça les sourcils.

« Léanne ? » fit-il, soucieux.

Il remarqua alors que les épaules de sa cousine sautaient légèrement. Il sourit doucement et s’assit en indien à ses côtés.

« Hé… tu veux me dire ce qui s’est passé? » dit-il avec une voix rassurante, en créole.

Léanne renifla et se releva pour s’asseoir à son tour de biais à Séraphin, dos au reste du gym. Elle essuya ses quelques larmes qui se calmèrent bien vite.

« Il m’enrage. Il ne veut pas toucher à des sujets sérieux même avec un bâton de 6 pieds. Et ça même quand c’est même pas si sérieux que ça! Et tout à l’heure je l’ai vu mettre un masque de sourire pour changer le sujet et… et tout d’un coup c’était comme s’il était un étranger, comme si je ne le connaissais pas. Combien de fois il a mis ce masque pour me cacher ce qu’il ressentait vraiment? Je pensais que l’on était assez proche pour ne pas se faire des faux semblant comme ça, mais j’ai dû me faire des illusions. »fit-elle en lâchant finalement le morceau.

Séraphin posa sa main sur la sienne et lui offrit un sourire compréhensif lorsqu’elle se tourna vers lui.

« Et le pire dans tout ça, c’est que je ne comprends même pas pourquoi ça m’affecte tant. Je voulais quelque chose de décontracté pour réapprendre à relaxer en dehors du travail. Ce n’est pas grave s’y on est moins proche que je pensais. C’est relax, non? »

Son cousin secoua légèrement la tête.

« Tu tiens à lui Léanne, alors c’est normal que ça t’affecte de remarquer qu’il évite tout sujet sérieux. Parce que comment vous pouvez apprendre à vous connaître réellement s’il n’est jamais tout à fais honnête avec toi? C’est normal que ça te frustre. » répondit-il.

Et il ne blâmait pas Ajartiel non plus, il se doutait que l’Ange devait avoir ses raisons d’agir ainsi. Ce devait être un mécanisme de défense créer pour survivre à des situations difficiles. Il ne fallait pas non plus oublier que le Chef des Anges venait d’un autre temps où les émotions n’étaient pas aussi ouvertement partagées que maintenant, même entre amis très proches. Cela ne voulait pas dire, par contre, que Léanne devait accepter ce fait et vivre avec, même quand cela la blessait. Non, soit ils allaient devoir essayer de grandir ensemble, soit ils allaient devoir séparer leurs chemins. Juste à cette idée, il avait envie de pleurer. Pas de minis Léanne… :’(

Il se racla la gorge en arrêtant ses divagations. Il eut toutefois encore plus envie d’aller parler avec M. Anderson du cas Ajartiel.

Léanne et Séraphin discutèrent encore un peu avant d’aller rejoindre la hutte du Fae où ils prirent une tisane en parlant de sujets plus légers.

De l’autre côté du cloître extérieur, le party du solstice d’été continua jusqu’à tard dans la nuit grâce aux acolytes de Séraphin et fut un réel succès. Léanne et lui se firent demander durant les jours suivant si la formule allait être répétée au solstice suivant. Alors que l’assistant-chef répondait par : Oui, absolument, Léanne de son côté était plus réservée et disait que ça allait dépendre des autres chefs.