[Suite de Bon matin la bicentenaire]

Il était tôt le matin lorsque Calahan arriva aux portes de l’entrée de la C.A.T. Une tasse de chai latté à la main, il bifurqua vers le garage et utilisa sa passe pour rentrer dans le grand hangar. Un sourire éclaira son visage à demi-endormi lorsqu’il vit Bari Gongju, son jet. Ou plutôt, le jet que la C.A.T. le laissait piloter et qu’il avait eu la chance de nommé. Ils allaient voler ensemble aujourd’hui.

Il prit la direction du bureau où se trouvaient les clés et les registres des avions de la C.A.T. Il remplit la paperasse réglementaire pour la sortie non-urgente d’un avion et vérifia les conditions météorologiques de son futur trajet. Par la suite, avec l’aide d’un technicien, il s’assura que Bari était en état de décoller. Une fois toutes les préparations finies,  il s’installa au commandes et dirigea le jet vers les portes de sortie du hangar où il y avait une zone d’attente et d’embarquement.

Il était à l’avance, il fut donc surpris de voir que Léanne Cissé, la chef des Fées était déjà présente, à attendre. Elle était sa mission. Il devait aller la reconduire à une base annexe de la C.A.T. Celle située dans les montagnes de la Mongolie. Il était responsable de transporter les personnes et les matériaux nécessaire au fonctionnement de cette base. C’était pourquoi il avait été choisi pour apporter la chef des Fées à sa première assignation depuis son accident.

Il ne connaissait pas les spécificités du travail que la Fée allait accomplir en Asie, mais il avait compris l’essentiel au travers des lignes. Depuis son assignation comme chef à cette base, Cormo Lantorrin avait été une malédiction pour les autres agents travaillant à cet endroit. Calahan croyait que la venue de Léanne avait pour but de gérer ce désagréable personnage. Si ce n’était pas de Cormo, il aimait beaucoup les gens de la base de l’Asie. Ils étaient un regroupement de marginaux amicaux. Le genre de personnes avec qui Stella s’entendrait bien.

Il arrêta le moteur du jet et en sortit pour aller à la rencontre de la Fée et de ses bagages. Celle-ci se tourna vers lui lorsqu’il descendit de l’escalier d’embarquement. Il fut surprit que, malgré sa petite taille et les épreuves qu’elle avait eu à traverser, elle dégageait une force sereine qui imposait le respect. La plupart des Fées volaient pour être au niveau de leurs interlocuteurs des autres races, mais pas Léanne, si les autres voulaient être à son niveau, c’était à eux de se baisser. C’était la première fois qu’il était seul en sa présence et, il devait le dire, elle était encore plus impressionnante de près.

En arrivant devant elle, il hésita un moment sur la marche à suivre. Comment devait-il l’aborder? Avec Ajartiel c’était facile, Calahan ne ressentait pas la hiérarchie en sa présence. Léanne, de son côté, l’intimidait. Ne voulant pas rester figé trop longtemps, l’Ange aux yeux dépareillés se mit au garde-à-vous pour saluer la chef, se disant que c’était la marche à suivre la plus respectueuse.

« Bon matin Chef Cissé. Le jet est prêt pour notre départ. » dit-il avec un ton sérieux qu’il n’avait pas l’habitude de prendre.

Le regard dur de la Fée passa sur lui, de ses pieds à ses yeux. Ses traits se détendirent et un beau sourire apparu sur ses lèvres.

« Au repos Capitaine Park. Tu peux te détendre, nous ne sommes pas dans un cours ou sur le champ de bataille. Ici, je suis Léanne. »

Le Coréen soupira de soulagement et prit une posture plus décontracté. Il répondit au sourire de la chef et l’observa un instant. Elle avait revêtu, comme lui, son uniforme de mission, ses ailes étaient cachées par une veste en coton ouaté coloré, beaucoup trop grande pour elle. Il n’était pas sûr, mais n’avait-il pas vu Ajartiel avec cette veste auparavant? Il ne savait pas si les rumeurs ne lui faisait pas halluciner des choses. Les longs cheveux d’ébènes de la Fée avaient été tressés, celles du milieux étant plus volumineuses que celles de ses tempes. Lorsque la lumière passait au-dessus, l’on pouvait voir des brins verts et dorés qui avaient été tressés au travers des nattes,. La Créole avait rassemblées ses tresses dans une queue de cheval basse qui reposait sur son épaule. À ses pieds, une petite valise et un sac à dos attendait sagement l’embarquement.

Calahan était surpris qu’elle n’apporte pas d’avantage. On ne lui avait pas donné le moment du retour de la chef, il croyait donc qu’elle allait rester pendant un moment. Et bon, peut-être que ses préjugés sur les femmes l’influençait plus qu’il ne le croyait. Il allait devoir réexaminer ses préjugés…

« Est-ce que je rentre vos bagages, Léanne? » dit-il, incapable de se débarrasser de toutes les formalités.

La Fée hocha la tête et un oiseau gris vient se poser sur son épaule. Son totem, remarqua Calahan. Il salua la bête d’un hochement de tête et celle-ci le lui rendit. L’oiseau gazouilla et Léanne leva les yeux au ciel en souriant. Réagissant probablement à ce que son Totem avait dit. L’Ange prit les maigres bagages de la Fée en pensant qu’il aurait bien aimé avoir un totem. Il ne se sentirait jamais seul avec un être qui le suivait partout.

Alors qu’il montait les premières marches de Bari Gongju, il entendit des voix en provenance de l’entrée du hangar. En regardant dans cette direction, il remarqua Séraphin et Ajartiel qui arrivaient. Étaient-ils les seuls membres du comité de départ de la chef des Fées? Il était vrai qu’il était tôt, peut-être avait-elle fais ses aurevoirs la veille. Il trouva bien drôle que son chef se présente. Est-ce que les rumeurs étaient fondées et que les charmes de la Fée avaient eu raison de lui? Calahan pouvait comprendre, Léanne était une très belle femme, mais il aurait cru qu’elle était un peu trop féroce pour le Magyar. Meh, il faisait bien ce qu’il voulait, mais le pilote n’allait pas se priver de l’agacer…

Calahan rentra dans le jet alors que Séraphin attira l’attention de Léanne en la saluant avec enthousiasme.

La décision de partir pour aider la base de l’Asie avait été prise sur un coup de tête. Après avoir entendu les difficultés que cette base annexe éprouvait, Léanne s’était proposée pour remettre les choses en place. Elle cherchait déjà une excuse pour sortir de la base principale depuis les évènements qui avaient suivis la célébration de sa fête. Pas qu’elle voulait fuir Ajartiel, mais elle ne réussissait pas à réfléchir concrètement quand il était dans les parages. À chaque fois qu’elle le voyait, ses idées perdaient de leur clartés et elle ne désirait qu’oublier toutes ses appréhensions pour pouvoir aller se réfugier dans ses bras à nouveau… Elle était assez terre à terre pour savoir que ce n’était pas une sage décision.

C’était pourquoi les problèmes de la base annexe étaient arrivés au bon moment, n’en déplaise à ses habitants. Mais ils lui donnaient une excuse pour s’éloigner de son ami ailé. De plus, elle était séquestrée à la C.A.T. depuis sa blessure et elle avait grand besoin de sortir. Elle ne comprenait pas comment faisait les résidents civils de la C.A.T. de constamment rester sous terre. Elle savait que certains le tolérait moins bien que d’autres, mais que tous les Catiens ne finissent pas claustrophobiques, elle ne savait pas comment c’était possible. Alors, une raison pour sortir un peu était très appréciée.

N'ayant reçu que de maigres protestations de la part des autres chefs, son départ avait été organisé 3 jours après que la décision ait été prise. Elle avait donc prit ce temps pour donner des bouchées doubles pour finir le plus de tâches qu’elle pouvait avant son départ. Elle ne savait pas combien de temps elle serait partie et même si elle allait pouvoir faire une partie de son ouvrage de chef à distance, elle voulait laisser le moins de choses trainer que possible. Séraphin et Émilienne étaient assez généreux de prendre plus de responsabilités pour elle à chaque fois qu’elle en avait de besoin, elle ne voulait pas rendre leur travail plus difficile.

Elle avait également eut un souper d’aurevoir, la veille de son départ, avec la plupart des Fées et d’autres invités qui voulaient lui souhaiter un bon voyage et du succès dans sa mission. Les détails de celle-ci n’avaient d’ailleurs pas été divulgués aux résidents de la C.A.T. Seuls les plus hauts gradés étaient au courant. C’était dans le but de la protéger qu’on lui avait expliqué, mais elle ne voyait pas en quoi c’était nécessaire… Elle respecta tout de même la mesure.

Le jour de son départ, elle s’était réveillée beaucoup trop tôt. Bien avant que le faux soleil ne se lève dans le cloître extérieur. Incapable de se rendormir, dans son lit froid sans la présence d’un certain Ange, elle s’était levée. Après avoir repassé au travers du dossier des problèmes de la base annexe et avoir défait tout ses bagages pour s’assurer de ne rien oublier et de les avoir empaqueter à nouveau, elle ne savait plus trop quoi faire. Lilou somnolait encore et elle ne souhaitait pas le déranger, alors, elle alla courir dans la noirceur du cloître extérieur. Une fois cet exercice fini et sa douche prise, elle détermina qu’il était assez près de l’heure de son départ pour aller attendre au hangar. Elle enfila son uniforme de mission et hésita avant de partir, observant la grande veste qui avait accrochée à l’arbre qui soutenait sa hutte et qui lui servait de patère. C’était un coton ouaté qu’elle avait ‘’emprunté’’ à Ajartiel. Il lui arrivait de dormir avec lorsqu’elle ne trouvait pas le sommeil. Elle l’utilisait aussi pour se réchauffer lorsqu’elle lisait tard dans sa hutte. Elle fronça le nez, hésitant sur le pas de la porte.

Apporte-la, lui dit son Totem. Personne ne va poser de questions et même s’ils le faisaient, ce n’est pas le premier vêtement trop grand pour toi qu’ils vont te voir dedans.

Avec la bénédiction de Lilou, la Fée enfila la veste et prit la direction des escaliers.

Sans surprise, elle arriva à l’avance. Elle attendit patiemment, les bras croisés en observant les quelques vas et viens qui occupaient le hangar aussi tôt le matin. Quelques techniciens lui jetèrent des coups d’œil, redressant leur posture dès qu’ils remarquaient sa présence et puis ils la saluait avec le sourire. Cela faisait plaisir à la chef. Elle inspirait le respect sans sembler complètement inaccessible, s’était un bon équilibre. Heureusement, les répercussions des rumeurs de sa relation avec Ajartiel, fondés ou non, n’avaient pas eut les effets qu’elle avait craint. Certes, elle avait reçue quelques remarques. Mais depuis qu’elle avait cessé de nier ses rapports avec son ami ailé, sans toutefois les confirmer, les mauvaises langues avaient perdus leur pouvoir sur elle et tout était revenu à la normal.

Lorsque le jet qui allait la conduire à sa destination arriva, à l’heure, nota-t-elle avec satisfaction, elle salua le pilote, Jeongho Park, qui prenait le surnom de Calahan, et le laissa monter ses bagages à bord. Alors que Lilou faisait des blagues par rapport à une certaine personne qui avait de la difficulté à interagir avec les Totems (contrairement à Calahan), Léanne entendit une exclamation familière.

Elle se tourna pour saluer Séraphin, mais déjà son cousin la serrait dans ses bras, faisant s’envoler Lilou qui était sur son épaule juste avant. Le Totem s’installa sur les cheveux de sa Fée alors qu’Hiro volait en cercles autour d’eux, avec l’excitation qu’on lui connaissait. La pie-grièche soupira devant l’agitation du Totem de Séraphin, mais il allait devoir admettre que son énergie allait lui manquer.

La chef des Fées ria à l’étreinte de son cousin et le serra en retour. Lorsqu’il se sépara d’elle, il prit son visage dans ses mains, la forçant à le regarder dans les yeux.
« Madame Cissé, je vous interdit de trop vous inquiétez et surtout, il est complètement défendu de vous surmenez. Certes, c’est un voyage d’affaire, mais je veux aussi que vous profitiez de ce temps pour penser à autres choses qu’au travail. Compris!!!!? »  dit-il avec un sérieux théâtrale.

L’Afro-Américaine leva les yeux aux ciel, mais accepta ses demandes avec la condition qu’il l’avertisse en cas d’urgence. Le Fae retrouva son beau sourire et la relâcha en se reculant.

« Seulement en cas de vie ou de mort… Et encore, seulement si c’est ma mort. » fit-il alors qu’Hiro se calmait assez pour se poser sur l’épaule de Léanne.

Tu vas nous manquez! Reviens vite s’il-te-plaît. Dit le moqueur-chat.

Léanne allait lui répondre lorsqu’elle remarqua, derrière Séraphin, qu’Ajartiel était présent. Elle ne figea qu’une fraction de seconde, reprenant vite contenance.

Certes, elle lui avait dit à la blague, la veille, qu’il devrait venir lui souhaiter bon voyage, mais elle ne s’était pas attendu qu’il vienne vraiment. Cela pouvait facilement être vu comme une grande marque d’affection. Quelque chose qu’elle le savait réticent à accomplir en public. Probablement que le déni Ajartiellien légendaire avait encore frappé ce qui expliquait sa présence. Elle n’en était pas fâchée, seulement surprise.

Elle lui sourit le plus normalement possible, comme elle l’avait fait depuis sa confession. Elle ne voulait pas le repousser, le blâmer ou le faire culpabiliser. Alors elle avait essayé d’agir envers lui comme elle l’avait fait avant qu’ils commencent à se fréquenter de nuit... Elle souhaitait rester amical en vers lui, tout en étant un peu plus professionnelle que dans la dernière année. Elle voulait garder une certaine distance. Les autres chefs avaient clairement remarqués la différence, mais elle n’avait pas répondu à leurs questionnements silencieux.

Malgré tout, il était devant elle et comme à chaque fois qu’elle levait la tête et que son regard croisait le sien, son cœur se sera dans sa poitrine. Sa chaleur lui manquait terriblement, ne pas pouvoir se réfugier dans ses bras quand ses responsabilités lui pesaient trop, ne pas pouvoir compter sur ses distractions lorsqu’elle se mettait à trop penser… c’était difficile. Mais cette distance était importante. Lorsqu’elle était avec lui, ses pensées n’étaient pas claires, son cœur les brouillaient, lui faisant lancer par la fenêtre toutes les précautions.

« Bon matin ! » la salua énergiquement le chef des Anges.

Léanne lui sourit et hésita à le serrer dans ses bras. Ce serait naturel de le faire, ils étaient amis, non? Mais pourquoi avait-elle si peur que si elle se laissait aller à cet élan d’affection, elle ne réussirait plus à partir?

« Bon matin » fit-elle ne voulant pas le laisser en attente d’une réponse. « Merci de venir m’accompagner à mon départ. »

Elle cacha ses mains dans les poches de la grande veste, ne sachant pas trop quoi ajouter de plus. Un soupire exagéré lui fit tourner la tête vers Séraphin. Elle avait manquer de peu le roulement des yeux de son cousin.

« Hiro, Lilou, venez, nous allons nous assurez que l’avion de Madame est en norme! » fit le Fae en prenant la direction du jet, ne laissant pas la chance à Lilou de protester, il le guida d’une légère tape.

En passant près de sa cousine, il en profita pour « l’accrocher »  et la pousser en direction d’Ajartiel. La Fée trébucha sous la force de Séraphin et elle dut se retenir de justesse à la main de son ami angélique pour ne pas tomber face la première.

« HÉ ! » fit-elle insultée.

Le Fae ne se retourna même pas, relevant seulement la main, suivit des deux Totems.

« Pardon, c’était un accident! »  dit-il pas le moindrement remords dans le ton de sa voix.

Léanne grogna en lui lançant des poignards de son regard… Jusqu’à ce qu’elle remarque qu’elle était toujours accrochée après Ajartiel. Sans le lâcher immédiatement, elle releva la tête vers lui et soupira, fâchée contre son cousin, puis un petit sourire gêné étira ses lèvres. Elle prit une grande inspiration et osa entourer Ajartiel de ses bras et cacha son visage contre son torse. Elle prit une grande bouffée de son chandail, s’imprégnant de son odeur.

« Tu vas me manquer, idiot. » marmonna-t-elle contre son T-shirt.

Le temps c’était arrêté pendant un instant pour Léanne. Pendant quelques secondes, il n’y avait qu’elle et Ajartiel. Elle s’imprégnait de sa chaleur et de son odeur, essayant de les mémoriser. Peut-être que ça rendrait leur séparation et son temps de réflexion plus difficile, mais en ce moment, elle s’en fichait. Elle s’accordait ce moment de faiblesse avant son départ. Peut-être que son temps avec le chef des Anges avait bien fini par avoir une certaine influence sur elle…

Après l’avoir étreint doucement, Ajartiel se sépara doucement d’elle. La Fée résista pendant une seconde, mais se laissa être gentiment repoussée. Il lui fallut beaucoup de maitrise de soi pour ne pas retourner immédiatement dans les bras de son ami. Son cœur se serra alors qu’une certaine distance physique et mentale se réinstallait entre eux. Elle n’osa pas relever le regard, de peur de ce qu’elle allait voir dans le sien.

“Ah... De toute évidence.” Dit le Hongrois.

La chef des Fée leva les yeux au ciel et retrouva son sourire. Il était charmant cet idiot auquel elle s’était attachée malgré elle… Et il le savait, cet emplumé.  Elle lui lança un regard boudeur, mais  ne lui en tenu pas rigueur. Elle le connaissait, c’était plus fort que lui, il devait prendre toute occasion qui se présentait pour blaguer sur ses charmes. Même si cette occasion n’était peut-être pas la plus appropriée. Elle savait qu’il n’avait pas réfléchit avant de parler, c’était sorti naturellement comme toutes les autres blagues qu’elle l’avait entendu faire par le passé.

Elle se demandait d’ailleurs s’il se pensait aussi irrésistible qu’il le laissait croire ou si c’était juste du cinéma pour cacher des insécurités. De son côté, elle ne pouvait qu’admettre qu’il avait malheureusement raison, il était attachant. Ça aurait été plus simple s’il ne l’avait pas été…

“De toute évidence, il fallait bien que je vienne pour m’assurer que tu n’oubliais rien. Séraphin t’a probablement déjà transmis ses recommandations, mais j’en ai d’autres !” se reprit l’Ange.

La Fée releva finalement son regard vers lui avec un air amusé, mais suspicieux. Quelles autres idioties allait-il déblatérer?  Elle aurait bien aimé qu’il prenne ce moment pour lui parler à cœur ouvert avant qu’elle ne parte et peut-être l’éclairer un peu sur où il se situait dans tout ça, mais elle ne se faisait pas de faux espoirs. Il était encore loin le temps où Ajartiel allait commencer à faire de l’introspection.

C’est en l’écoutant lui donner ses « recommandations », qu’elle réalisa que c’était sa façon de lui démontrer qu’il tenait à elle. Un beau sourire étira ses lèvres couleur chocolat en l’entendant parler. Elle ne sut résister…   Agilement, elle se mit sur la pointe des pieds pour déposer un bref bisou sur sa joue. Elle se laissa rapidement retomber sur ses talons. Ne voulant pas lui laisser le temps de réagir et briser le moment, elle se mit à reculer, un pas à la fois, vers le jet, alors que les voix de Calahan et de Séraphin se faisaient plus claires. Probablement se rapprochaient-ils de l’entrée de l’avion.

« Ne me dis pas, Ajartiel, que tu t’inquiètes pour moi? » fit-elle, espiègle. « Histoires ou pas, je te rapporterait un souvenir. Et toi, aussi, tu me conteras tes aventures absurdes à mon retour. Je n’ai aucun doute que tu vas en avoir pleins! »

Elle se retourna vers l’escalier menant à l’avion qui allait la transporter jusqu’en Asie. Elle posa la main sur la rampe et releva la tête vers la porte d’où sortaient Séraphin, suivit par un Calahan visiblement un peu agacé.

« Je vous assure Séraphin, la couleur de la cabine ne vas pas influencer nos chances d’accident. Tout vas bien. Vous allez pouvoir suivre notre déplacement à la tour de contrôle. » dit le Coréen alors que Lilou passait au-dessus de lui pour faire un tour de Léanne avant de faire de même avec Ajartiel.

« Tu as entendu ça, Ajartiel? » fit le Fae en descendant les marches. « Calahan se moque de mes inquiétudes pour la sécurité de notre chef bien aimée. Je suis certain qu’un mauvais agencement de la couleur des murs de l’habitacle avec les tissus des bancs peut très bien influencer les réflexes d’un pilote et de ses passagers. »

Dans un contexte plus relax, avec des amis, Calahan serait rentré dans le jeu de Séraphin et aurait ajouté à ses blagues. Mais il était un peu nerveux. Il ne connaissait pas beaucoup le Fae et sa chef et il savait que la sortie de celle-ci en inquiétait plus qu’un. Particulièrement à cause de sa blessure encourue sans sa dernière mission. Il avait donc un rôle important qu’il prenait sérieusement. Et de plus, il n’osait pas blaguer devant la Fée qui n’était pas reconnue pour son sens de l’humour.

Soucieux de faire bonne impression, il regarda la chef, espérant qu’elle ne prendrait pas au sérieux les blagues de son cousin.

« Je vous assures, Chef Cissé, tout est en norme, j’ai vérifié à deux fois avec le technicien. Il n’y a pas place à s’inquiéter. »

Après trois tours d’Ajartiel, Lilou vient se poser sur son épaule pour, lui aussi, lui faire ses aurevoirs. Il n’était pas prêt à l’admettre, mais l’Ange, malgré sa stupidité évidente, avait commencer à lui plaire.

En entendant les commentaires de son cousin, Léanne leva les yeux au ciel, était-ce vraiment le moment? Normalement, il était plus sérieux en situation de travail.  Elle se dit qu’il était vrai qu’il n’était pas seulement présent en tant qu’assistant-chef, mais aussi en tant que son cousin et meilleur ami. Elle se demanda s’il avait décidé que cette dernière dénomination était plus appropriée et avait donc endosser un comportement moins formel.

Mais Léanne connaissait bien Séraphin et elle soupçonnait que ses singeries étaient le résultat de l’anxiété du Fae. Il s’inquiétait encore pour elle. Il avait tenté de la dissuader de partir, il s’était proposé de prendre sa place ou d’y aller avec elle, mais elle avait refusée, préférant retrouver son autonomie.

La chef des Fées comprit qu’il ne s’était pas encore complètement remis du choc de voir sa cousine grièvement blessée. Elle voyait bien qu’il souhaitait la protéger de toute souffrance additionnelle et bien que Léanne appréciait cette marque d’affection de la part de son cousin, elle était blessée qu’il ne croit pas d’avantage en elle. Elle allait devoir lui prouver à nouveau, à lui et à beaucoup d’autres à la C.A.T., qu’elle était encore forte et indépendante. La vie lui avait assené beaucoup d’épreuves, mais elle avait toujours sût se relever. Cette fois-ci n’était pas différente et elle avait bien hâte que les gens qui tenaient à elle le comprennent.

Lorsqu’Ajartiel embarqua dans les plaisanteries de Séraphin, Léanne ne fut pas surprise. Elle fut plus déconcertée de voir Lilou sur l’épaule du chef des Anges.

L’oiseau et le Hongrois échangèrent un regard, pendant que Calahan essayait de minimiser les "inquiétudes" de son chef.  Le Totem commença un sifflement, mais s’arrêta au milieu d’une note, réalisant qu’Ajartiel ne pouvait pas le comprendre. Un petit soupire lui échappa et puis, il se rapprocha de la tête de l’Ange pour venir s’y frotter affectueusement. Il espérait qu’au moins, si ses mots ne seraient pas compris, il réussirait à communiquer à cet emplumé ce qu’il ressentait. Il ne lui en voulait plus et même s’il n’était pas encore prêt à s’excuser, il ne voulait plus se fâcher contre Ajartiel.

Léanne sentit un de l’eau remplir ses yeux alors que son Totem décidait d’officiellement de faire la paix avec le chef des Anges. Elle eut a peine le temps de repousser ses larmes qu’on l’interpella. Elle se retourna pour voir arriver son amie Émilienne. Elle sourit à la Fée qui volait vers elle.

« Ouf. J’ai cru que j’arriverais trop tard. » dit-elle.

Léanne secoua doucement la tête. Lilou s’envola de l’épaule d’Ajartiel et vient se poser sur celle de sa Fée.

« Tu arrives juste à temps. Merci de passer nous souhaiter tes bons vœux.  C’est très apprécié. Si je peux me permettre de te demander un service, est-ce que tu vas pouvoir surveiller Ajartiel et Séraphin pour qu’ils ne fassent pas trop de bêtises pendant mon absence? » lui demanda-t-elle.

Et puis, elle regarda la Fée aux grandes ailes de papillons et hésita un moment. Elle voulait la serrer dans ses bras, mais ne savait pas si c’était quelque chose qu’Émilienne accepterait. Oh! et puis elle ne la reverrait pas avant longtemps et elle ne voulait pas avoir de regrets. La chef des Fées attira son acolyte dans ses bras et la sera avec affection. Lorsqu’elle la libéra, elle sourit à son amie.

« Fait attention à toi et comme je l’ai déjà dit, surveille les 2 idiots. Je vais vous communiquer lorsque j’arrive. Merci de t’occuper de mes fonctions avec Séraphin le temps que je suis partie. »

Un bras vient entouré l’épaule de Léanne et Séraphin s’accota contre sa cousine, tout sourire.

« C’est qui que tu traites d’idiots? Pas moi j’espère! » fit-il en serrant affectueusement Léanne contre lui.
« Jamais de la vie! Voyons! » mentit Léanne qui le serra en retour avant de se libérer de son emprise.

Elle monta trois marches, puis se tourna vers Ajartiel pour lui envoyer le main, le cœur gros, mais contente et satisfaite de sa décision.

« À bientôt Aja! Lilou fait dire que tu vas lui manquer à lui aussi! » dit-elle, respendissante.

L’oiseau sur son épaule s’ébroua, offusqué, mais n’en fit pas un cas. Il pépiât quelque chose et le sourire de Léanne s’élargie.

« Il ne veut pas que tu finisses sans lui le livre que vous lisiez dans mon bureau. » ajouta-t-elle avant de se tourner vers Séraphin, Hiro, qui était sur son épaule, et Émilienne. « Au revoir mes amis. À bientôt. »

Elle croisa le regard de Séraphin qui avait laissé tombé son masque espiègle, son inquiétude perméant ses traits.

« Sois prudente s’il-te-plaît. » murmura-t-il dans un souffle.

Léanne acquiesça de la tête, avec un léger soupire. Elle était capable de prendre soin d’elle et elle allait leur prouver qu’elle était forte et résiliente et qu’ils devaient arrêter de s’en faire pour elle. Elle était Léanne fucking Cissé! Rien ne pouvait l’arrêter!

Elle monta les dernières marches et releva la tête vers Calahan, un air sérieux à nouveau sur son visage.

« Capitaine Park, je suis confiante que vos compétences vont nous menez à notre destination, peu importe la hauteur des sièges et la couleur des murs. » dit-elle sur un ton formel, mais finissant sa phrase par un clin d’œil.

Elle se tourna un dernière fois pour regarder Ajartiel et lui offrit un sourire confiant. Il n’avait pas à s’en faire, elle reviendrait victorieuse.

Et puis elle rentra dans la cabine. Calahan salua les visiteurs et ferma la porte du jet. Il alla s’installer à côté de Léanne dans le poste de pilotage et mit son casque d’écoute. Avec assurance, il se mit au travail, retournant des interrupteurs et ajustant des commandes. Le moteur du petit avion se réchauffa et le son des turbines qui commençaient à tourner ce fit entendre.

Léanne l’entendit communiquer avec la tour de contrôle et vit que la porte du couloir menant à l’extérieur s’ouvrit alors que des alarmes avertissant la sortie d’un jet se faisaient entendre.

Le pilote à ses côté lui parla grâce aux casques d’écoute : « Prête pour le départ Chef Cissé? » fit-il en la regardant, un sourire confiant sur son visage.

Léanne sourit à son tour. « Prête, Capitaine. » répondit-elle.

« Alors allons-y. » dit-il en dirigeant l’appareil vers les portes maintenant ouverte.

Léanne essaya de voir ses amis une dernière fois au travers du hublot, mais l’angle de l’avion ne lui permit pas de les apercevoir. Elle grimaça et puis se concentra sur le long couloir métallique s’avançait vers elle. Le jet passa les grandes portes et s’infiltra dans le large couloir éclairé de tout son long par des lumières rectangulaires positionnées de chaque côtés.

L’avion prit de la vitesse et après ce qui paru une éternité à Léanne, la lumière du matin apparu au bout du tunnel et puis quelques secondes plus tard, finalement, ils étaient dehors. Elle regarda la porte du sas d’accès ce fermer derrière eux et puis, lentement, les arbres devinrent de plus en plus petit et la forêt qui cachait les quartiers de la C.A.T. s’éloigna derrière eux…